2. Les deux protagonistes
Il y aurait une biographie comparée à écrire de Freud et de Wagner-Jauregg. Ils se connaissent de longue date, se tutoient et se respectent. Ils ont étudié la médecine ensemble avec les mêmes maîtres. Mais alors que Freud invente un nouveau rôle pour le psychiatre, celui de représentant des intérêts de son patient, et défriche un nouveau continent, l’inconscient, Wagner-Jauregg, lui, endosse les vêtements du psychiatre traditionnel. Il n’entend pas renoncer à son identité médicale. Rien d’étonnant dès lors si Freud se voit attribuer le prix Goethe en 1930 pour les qualités littéraires de son œuvre et si Wagner-Jauregg reçoit le prix Nobel de médecine en 1928 pour avoir trouvé un traitement, la malariathérapie, contre la syphilis. Freud mourra en 1939 à Londres et Wagner-Jauregg une année plus tard, à Vienne.
La postérité retiendra le premier et oubliera le second. En 1920, cependant, Wagner-Jauregg est considéré comme l’une des plus éminentes personnalités scientifiques de son temps. Il dirige un hôpital et enseigne à l’Université. Et le voici sommé de se justifier devant une Commission d’enquête et menacé de forfaiture. Que lui reproche-t-on au juste ?