Un Kleenex pour Aude Lancelin !

“C’était une femme, maintenant ce n’est rien. Attachons un boulet à chacun de ses pieds, jetons-la dans la mer “, écrit Balzac à propos de la Duchesse de Langeais.

La vraie gauche contre les méchants

Avant d’être jetée dans la mer, Aude Lancelin, longtemps duchesse du Nouvel Obs et de Marianne, lance un cri  de détresse dans Le monde libre, s’estimant victime de la servitude des médias. Son crime ? Être demeurée fidèle à la gauche, la vraie, celle d’Alain Badiou et de Frédéric Lordon, alors que ses patrons glissaient insidieusement vers la droite et soutenaient  les pouvoirs d’argent, voire le gouvernement social-traître qui musèle la presse. Ses cibles ? Outre ses anciens employeurs, le diabolique Bernard-Henri Lévy, le nouveau Barrès Alain Finkielkraut et le méchant Pierre Nora. Elle n’a pas de mots assez durs pour ces traîtres, mâles blancs, juifs, diaboliques, les seuls qui ont l’honneur d’être cités nommément, charmante coïncidence. D’ailleurs Philippe Muray l’avait prévenue : ” Si vous vous en prenez à Bernard-Henri Lévy, on vous coupera l’électricité et, un jour, les éboueurs ne passeront plus dans votre rue. “.

Plaidoyer pro domo

Son plaidoyer pro domo, vite pesant, place le lecteur dans la position du voyeur incrédule devant tant d’ignominie, mais comme il a du cœur il sera prêt à voler au secours de cette chèvre de Monsieur Séguin qui paie sa liberté de pensée au prix fort et veut en découdre avec la fascisation rampante de la France. Elle aurait été plus convaincante si elle avait rédigé son libelle au temps où elle était crainte et courtisée. Il ne lui reste aujourd’hui plus qu’une arme, une arme que les femmes manient avec précision et cruauté : la vengeance. Ce pourrait être délicieux et convaincant. Mais passées les premières pages, tant de hargne finit par lasser. Une boîte de Kleenex aurait aussi bien fait l’affaire.

 

 

Le Monde libre, Aude Lancelin – Les liens qui libèrent.

 

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Bernard-Henri Lévy, un bretteur chez Ruquier…

Bernard-Henri Lévy est un rhéteur hors pair et un bretteur incomparable. Il l’a prouvé, une fois de plus, chez Laurent Ruquier en défendant son livre L’Esprit du judaïsme qui aurait pu s’intituler Le Génie du judaïsme évoquant ainsi les mânes de Chateaubriand et de son Génie du christianisme. Ce que le monde doit aux Juifs, il a eu raison de ne pas trop y insister. Ce que le monde perd sans eux, il faut vraiment être atteint de cécité spirituelle pour ne pas le voir. Et pourtant, l’antisémitisme renaît dés lors qu’on croit l’avoir asséché. Bernard-Henri Lévy, quitte à plonger ses interlocuteurs dans la perplexité, n’a pas manqué, et à juste titre, de rappeler que le venin antisémite est toujours présent dans la société française dès lors qu’on évoque Israël ou des hommes d’Etat comme Laurent Fabius ou Dominique Strauss-Kahn. Il aurait pu ajouter que le nouvel antisémitisme qui débarque allègrement des pays arabo-musulmans fait peser sur les Juifs de France une menace pire encore. On ne pouvait pas ne pas songer en l’écoutant au mot de Billy Wilder s’exilant aux États-Unis : « Les Juifs optimistes ont fini à Auschwitz, les pessimistes à Hollywood. » Bernard-Henri Lévy, tout en distinguant parfaitement le racisme de l’antisémitisme, pèche sans doute par optimisme en esquivant les menaces que font peser les arabo-musulmans sur l’Europe. Et, plus encore, en imaginant un Proche-Orient apaisé. Léa Salamé n’a pas eu tort de citer un conseiller d’Obama disant qu’intervenir militairement ou s’abstenir est également catastrophique.

Bernard-Henri Lévy, au nom du judaïsme, se croit investi d’une mission. On peut lui reprocher sa mégalomanie, son narcissisme, voire même sa naïveté, mais pas sa sincérité.  Certains le rangeront volontiers dans la catégorie des besser-waïsser, expression yiddish dont la traduction la plus fidèle s’exprime dans cette histoire juive : « Quelle est la différence entre Dieu et un Juif ? Dieu sait tout, un Juif sait tout mieux. »

Pourquoi pas ? Mais il reste le panache du personnage, même sans chemise blanche, son ironie d’homme blessé et une volonté de comprendre l’incompréhensible qui, à titre personnel, me touchent.
En revanche, qu’il écarte d’un revers de la main Spinoza du judaïsme, alors qu’il en est la gloire, me fait douter de son jugement… et, parfois, du mien aussi.

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