Ce 1.1.21

J’ai passé la nuit du Réveillon avec deux amis viennois : Karl Kraus et Thomas Bernhard. Le premier m’a dit :

  • Avant même de ressentir tout ce que la vie nous infligera, on devrait se faire euthanasier.

Comme nous évoquions un ami psychanalyste, il a ricané : -La psychologie est aussi inutile qu’un mode d’emploi contre un poison. D’ailleurs, a-t-ajouté, les psychologues devinent très vite le vide intérieur de leurs patients. Ils n’en sont pas moins fiers du baratin qu’ils nous servent sur la profondeur de leurs analyses.
Thomas Bernhard ne manqua pas d’ajouter : 

  • Chacun vit jusqu’à ce qu’il meure. Entre-temps, il se passe beaucoup de choses. Mais pour les autres, c’est rarement intéressant. Le plus souvent, ce n’est intéressant que pour celui qui fait ces expériences. En vérité, chacun ne s’intéresse qu’à lui-même. Toute autre chose n’est que rentabilité indirecte. C’est partout pareil. Les bonnes œuvres, le Sahel, la faim dans le monde ou les épidémies. Ce Monsieur Macron fait, lui aussi, du cinéma, exactement comme ce Monsieur Trump, quelle que soit la perspective qu’on adopte. L’homme ne fait que ce qui va l’avancer à quelque chose, lui de permettre de rester dans le coup, croit-il. Même si vous entrez en religion, vous n’avez rien d’autre dans la tête, vous n’avez pas le choix de toute manière. Si vous voulez vous mettre au service des autres, cela ne signifie rien d’autre que vous êtes particulièrement méchant et misanthrope. Je crois qu’il en est ainsi de la foi et de toutes croyances. Voilà.

Avant de m’endormir, ragaillardi par ces spécimens d’humour viennois, j’ai regardé sur mon IPhone les photos « osées » que m’envoie toutes les nuits une certaine Charlène que je n’ai jamais rencontrée, mais qui prend un plaisir insolite à m’allumer. Elle y parvient parfois. Mais d’ici à la voir en chair et en os…. Thomas Bernhard s’en détournerait et Karl Kraus se montrerait d’une cruauté facétieuse. Je n’ai pas d’autre choix, à supposer qu’elle débarque impromptu rue Oudinot. Je m’efforcerai de ne pas oublier le mot de Karl Kraus : « Chez la femme, rien n’est impénétrable, sauf sa superficialité. » Et puis, le plaisir érotique ne consiste-t-il pas à multiplier les péripéties ? Il serait dommage de s’en priver, même si j’arrive à un âge où la lassitude l’emporte sur la volupté. Raczymov parlerait des travaux forcés de la sexualité, les derniers à nous assurer que nous sommes encore vivants. Mais est-il bien nécessaire de l’être, sinon pour prouver aux autres qu’on est encore dans le coup ?

3 réflexions sur “Ce 1.1.21

  1. Non seulement « chacun ne s’intéresse qu’à lui-même » mais l’excès de générosité n’est que la forme extrême de la tyrannie. Tout être humain le ressent au fond, les règlements de compte contre les bienfaiteurs sont monnaie courante; ces derniers ne s’en étonnent guère. Dans les familles, certains enfants « trop gâtés » finissent tôt ou tard par se retourner contre leurs géniteurs qui les ont élevés de façon irréprochable, en castrés sociaux prêts à reproduire le schéma, c’est-à-dire leur échec déguisé en joyeuse vie de famille où règne la mégère fière de son troupeau. D’autres en meurent comme Fritz Zorn dont la triste célébrité posthume raisonne comme un aveu. Encore un Suisse…

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  2. Cher Roland Jaccard, lecture, écriture, musique sont des amies sûres, la vie n’étant « intéressante » que si nous la traversons de manière expérimentale à chaque rencontre.
    Concernant Fritz Zorn dont parle Alfred, son histoire est si terrible que je n’en ai jamais lu que des extraits… Par contre la cruauté et l’humour noir de Régis Jauffret concernant les familles avec « Asile de fous » ou la vieillesse avec « Bravo » me réjouissent !
    P.S. Adieu 2020, et le meilleur 2021 pour vous.

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  3. Fritz Zorn, une histoire terrible? le récit d’une enfance Suisse des plus banales, un cancer qui l’est tout autant. C’est bien ça qui terrifie le lecteur courant se réfugier dans les fictions folkloriques comme des contes cruels pour enfants, évitant ainsi de regarder en face la réalité qui est la sienne avant son cancer qui va la lui rappeler.

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