1. Matzneff est un vieil ami, presque un frère. Nous avons passé d’innombrables étés à la piscine Deligny et dîné régulièrement avec Cioran et François Bott qui dirigeait le supplément littéraire du Monde. J’y travaillais également et j’étais parvenu à obtenir une chronique pour Gabriel Matzneff , chronique insolente et décalée qu’il a tenue pendant sept ans, en dépit de la stupeur et de l’indignation de la plupart des rédacteurs. Ce furent des années glorieuses qui prirent fin au début des années 1990, en même temps que coulait la piscine Deligny, lieu mythique du glamour et du sexe. J’y ai même connu Nastasjia Kinski….bref, On ne pouvait pas être plus proche du Paradis. Gabriel y emmenait Vanessa Springora, une lycéenne de 14 ans. Celle par qui trente-cinq ans plus tard le scandale allait arriver. Depuis, Gabriel s’est réfugié en Italie, je reçois des menaces de mort. Après le Paradis, l’Enfer. Je suis consterné.
2. Quand Gabriel avait publié un bref essai sur ses goûts sexuels, Les moins de seize ans sur la demande de Jacques Chancel, le livre avait été accueilli avec jubilation. Je lui avais même consacré une chronique dans 24 Heures. Et à la piscine Montchoisi, je connaissais des lycéennes qui avaient des liaisons avec des hommes plus âgés, souvent des amis de leur père. Pour d’obscures raisons, ces délicieuses transgressions passent aujourd’hui pour des crimes abominables. Matzneff qui recherchait la gloire, l’a enfin trouvée, mais sous la forme la plus abominable : il est devenu M. le Maudit, lui qui était adulé et personnellement protégé par François Mitterrand.
3. Que Vanessa Springora ait eu envie de raconter sa folle passion pour Gabriel, je le comprends fort bien. Elle y est d’ailleurs parvenue avec un incontestable talent, de même que Linda Lê dans « Solo » avait réglé ses comptes avec moi, me traitant de filou sentimental. C’est de bonne guerre.
4. Que Vanessa ait souffert d’avoir été trompée par Gabriel, je le conçois fort bien. Les premières amours se terminent mal en général. Les autres aussi, d’ailleurs.
5. Ce qui a changé depuis les années 1990, c’est sans doute un néo-féminisme qui vise moins une égalité des droits qu’à une castration de l’homme. C’est ce qui m’est apparu très clairement quand j’ai écrit mon livre sur John Wayne et que je l’ai comparé à Lacan pour le refus de la castration. Il semble bien que ce combat soit perdu.
6. Que les femmes demandent plus de respect est parfaitement légitime. Mais trop de respect risque fort d’étouffer le désir.
7. L’affaire Weinstein est une affaire de gros sous : il n’y a plus que deux femmes sur cent plaignantes qui ont maintenu leur plainte. Mais le climat général est favorable à la judiciarisaton des rapports humains, y compris dans ce qu’il ont de plus intime. Est-ce vraiment un progrès ?
8. Matzneff a-t-il mérité ce qui lui arrive ? Mettons qu’il a sous-estimé la férocité des humains lorsqu’ils chassent en meute et vécu dans une forme d’érotomanie, c’est-à-dire avec l’illusion délirante d’être aimé. Il a passé sa vie à construire sa propre statue. Et voici qu’elle est démolie. C’est un rude coup pour son narcissisme.
9. Tu me demandes, Chère Isabelle, si je me sens coupable de comportements sexuels inappropriés. Pas vraiment. Contrairement à Matzneff, je n’ai aucune attirance pour les petits garçons et pour les petites filles. Sur ce plan, je suis désespérément normal. Ai-je été cruel avec certaines filles ? Sans doute, mais paradoxalement je suis resté en excellents termes avec celles qu’on désignait autrefois comme nos « conquêtes », sans avoir conscience que nous étions le plus souvent leur proie. J’en parle dans mon dernier livre : « Confession d’un gentil garçon ».
10. Il est très troublant pour moi, après avoir travaillé pendant trente-cinq ans pour un quotidien du soir, « Le Monde » en l’occurrence, qui décerne des brevets de moralité, de me retrouver à « Causeur » où règne une totale liberté de ton et un esprit combattif….notamment contre le féminisme et l’islamisme conquérant. Élisabeth Lévy, tout comme moi, défendons les proscrits et les mauvais esprits. Matzneff bien sûr, mais aussi Richard Millet ou Éric Zemmour, tous ceux que l’empire du bien tente de réduire au silence. Il est vrai à ce titre que je suis menacé et que je prends des risques. Mais enfin, n’ai-je pas appris dans mon adolescence qu’il fallait « vivre dangereusement » ? Et qu’écrire, c’est le plus souvent signer un pacte avec le Diable ? Je vis aujourd’hui avec une jeune fille de 20 ans, turque de culture musulmane, que son frère a tenté de poignarder parce qu’elle est athée et libre de mœurs. Je dis oui à l’esprit de résistance et je vomis Gallimard qui retire Matzneff de son catalogue.
11. Dans le mail que je viens de recevoir de Gabriel, il m’écrit que pour l’instant il ne tient pas à assombrir son insouciance – qui est notre bien le plus précieux – par des inquiétudes regardant l’avenir, car celui-ci, quel qu’il soit, sera affreux. « Cela dit, conclut-il, nos contemporains sont devenus extraordinairement cons. » Conclusion que je reprends à mon compte : cons et lâches.
Les proscrits te remercient, cher Roland.
Chaleureusement,
Olivier
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Merci pour ce texte.
Je rédige, pour ma part, une courrier d’un lecteur de Gabriel Matzneff.
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Merci pour ce texte.
Je rédige, pour ma part, un courrier d’un lecteur de Gabriel Matzneff.
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J’aimai bien Cioran jusqu’à ce que je découvre dans un de vos livres que Matzneff dînait chez lui et était apprécié. Je préfère de loin l’opinion de Jean Marie Perrier qui a tourné la page du sexe pour ne pas imposer sa vieille carcasse non desirable ( et non désirante) à autrui. Quand à votre jeune fille turque , j’espere qu’elle héritera pour être moins enchaînée. Comme à écrit cet obsédé de Philip Roth , le sexe tiendrait plus de la fracture que de l’accomplissement ou de la liberté comme voudraient le faire croire tant de prédateurs. Sur Internet , Matzneff est cité avec ses copains Lang et Mitterand dans la sinistre affaire du coral. Personne n’est plus manipulable qu’un enfant , en abuser dénote une grande bassesse.
Ne rien défendre peut se concevoir, Et le pouvoir ( narcissique entre autres) crée des monstres sous leur masque de dignité.
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Que les choses soient claires, vous reconnaissez que votre ami Gabriel Matzneff avait une « attirance pour les petits garçons et les petites filles », qu’il séduisait des gamines de moins de quinze ans (tout ceci est interdit par la loi) mais vous n’avez pas signalé ces faits à l’époque et aujourd’hui vous soutenez ses actes?
Je pense à toutes les petites victimes de Gabriel Matzneff et je vous trouve indécent Monsieur. Avez-vous des enfants?
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« Avez-vus des enfants ? » Un argument-massue qu’on nous ressert à toutes les sauces, mais tout à fait déplacé. Utilisé en général quand on n’a plus rien à dire. Je me souviens d’une animatrice « populaire » de télévision qui, au terme d’un débat sur la prostitution et la pénalisation des clients, me demanda si j’avais une fille et, comme c’est le cas, si j’accepterais qu’elle se prostitue !!!
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Monsieur Matzneff est un délinquant qui vit aux crochets de l’Etat.Au surplus il écrit de très mauvais libres.Son admiration pour Cioran n’excuse rien.
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Il n’est pas nécessaire de revenir sur les qualités et les défauts du plutôt beau livre de Vanessa Springora (« Le Consentement », Grasset), sur les motifs plus ou moins nobles qui ont conduit à sa rédaction et à sa publication, sur les échos qu’il a eus dans les débats ouverts par sa parution, sur les réactions, la plupart peu glorieuses, qu’il a provoquées dans le cercle journalistico-éditorio-politique et au-delà.
Par contre, comme lecteur et admirateur des livres de Gabriel Matzneff, réagir et fournir quelques explications m’a semblé nécessaire.
Aujourd’hui encore, je me souviens de ma découverte du premier volume du journal intime de Gabriel Matzneff (« Cette camisole de flammes », La Table Ronde »). C’était à Venise en février 1992, j’allais alors avoir 17 ans et je voyageais seul pour la première fois.
Le jeune homme que j’étais à l’époque y a découvert beaucoup de belles choses (un style, une vision du monde, un désespoir surmonté, des références littéraires et philosophiques et un rapport particulier à la religion et à ses beautés).
J’ai ensuite, en vieillissant, lu presque tous les livres de Gabriel Matzneff. J’y ai retrouvé, très souvent, ce qui m’avait séduit lors de ma première lecture (avec, en plus, les descriptions d’une certaine vie mondaine, d’amitiés, de voyages, d’histoires d’amour et de ruptures amoureuses).
Les passages de son journal intime relatant les actes qui lui sont aujourd’hui reprochés, je les ai lus (comme les ont lus ceux qui ont édité les livres de cet auteur et qui feignent aujourd’hui d’êtres choqués) mais ce n’est pas eux qui ont motivé ma lecture suivie et qui m’ont fait aimer ces textes : ce n’était pas à moi, simple lecteur, de les juger ou de les faire juger par d’autres dont c’est la profession.
Relire Gabriel Matzneff aujourd’hui, tant que cela est encore autorisé, m’a permis de revoir (de revivre ?) une partie de ma jeunesse de lecteur et donc de me sentir un moment plus jeune et, peut-être, plus vivant. Le pouvoir de la littérature, c’est aussi cela.
Il y a quelques années, j’avais salué Gabriel Matzneff lors d’une rencontre à l’improviste à Paris. Nous avions brièvement échangés sur ses livres et sur leur impact sur un jeune lecteur. Je le referai aujourd’hui, par fidélité à celui que je fus et à celui que je suis encore, parfois.
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Rien à redire sur ces réflexions justes et sensible. Merci de ce témoignage.
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Il me semble qu’une certaine mauvaise foi volant au secours de l’hédonisme pédophile revendiqué comme tel ne peut rien changer au fait que la prédation sexuelle qui s’exerce sur des enfants et des adolescents(tes) n’a rien à voir avec la littérature ni la morale, mais relève plutôt de la pathologie psychiatrique et du droit pénal.
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S’il avait été musulman, afghan et taliban, il aurait pu, tel Abu Nuwas, jouir tout à son aise du corps gracile des fillettes et des garçonnets, sans avoir de compte à rendre à quiconque à l’exception du Très Haut. Car ces ennemis barbus et enturbannés de l’Occident, qui ne rêvent que de djihad conquérant et de grand remplacement, savent vivre et profiter des bienfaits que le Très Haut a su répandre ici bas pour leur plus grande satisfaction!
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Tout cela est bien étrange et même bizarre vous avez dit bizarre …..
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Question de perspective pour moi Matzneff est l’incarnation du gros con bien rétrograde prétentieux sans substance, sans imagination, sans élan un cas d’école de pervers narcissique menteur et manipulateur qui a oeuvré à faire le mal toute sa vie. Aucune cohérence intellectuelle du badinage d’intellectuel d’opérette , joliment emballé. Pas étonnant qu’à l’étranger on dise qu’il n’y a plus de littérature en France. Les auteurs qu’il cite je les lis dans la langue originale pas besoin de ses digressions farfelues, il ne comprend rien à rien vu qu’il n’y a que lui qui l’intéresse.
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Consternant de suffisance: je suis réprouvé donc je suis, voilà toute la philosophie de nos petits vieux révolutionnaires… Du balai, l’époque ne repasse pas les plats!
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Et les petits jeunes réactionnaires, si avides de prendre le pouvoir, rejettent en bloc une époque à laquelle ils ne comprennent rien…
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Matzneff est l’auteur d’un petit bijou : « Nous n’irons plus au Luxembourg », qu’il a écrit à la trentaine. Si l’histoire n’est pas réellement transgressive, l’homme à la soixantaine mais la jeune fille, 16 ans et a été émancipée… On y voit une réelle attirance;, une vraie admiration pour les jeunes filles. La description de l’époque (Paris, début des années 70) est tout à fait dans le ton. Pour le reste, son journal, que j’avais survolé à la Fnac, il y a plusieurs décades, m’était tombé des mains. Il aurait gagné à rester dans la fiction, ou à se relire, avoir un peu moins de complaisance, être plus lucide, et un peu moins dans la toute-puissance.
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A la lecture de ces réflexions le mot de Cioran me vient à l’esprit « Extermination »
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Vanessa Springora indique en quatrième de couverture de son livre le mot vengeance, elle n’a pas changé depuis qu’adolescente adepte des crises d’hystérie suivies de réconciliations, à l’égo surdimensionné en proportion de celui de son mentor volage, elle ne digérait pas ne pas avoir l’exclusivité. A 16 ans moins deux mois elle a trouvé sans peine la force de rompre (page 152: « quand j’annonce à ma mère que j’ai quitté G. ,elle reste d’abord sans voix, puis me lance d’un air attristé: « le pauvre, tu es sûre ? il t’adore ! »). Comme dirait Fabrice Luchini « c’est énorme » . Allez demander à sa mère qui a de l’emprise sur qui à ce moment là ?
Si jusqu’à 14 ans 11 mois et 29 jours la loi et les féministes s’accordent pour dire qu’une fille n’a pas de cerveau, qu’en est-il d’une fille de 16 ans (moins 2 mois) dont tout le monde s’accorde à penser (à commencer par sa mère !!) qu’elle est en avance sur son âge, mettons deux ans ,ce qui nous amène à 18 d’âge mental.
Il aurait suffit d’une interview de la mère sur youtruc avant la sortie du livre pour retourner l’opinion publique et stopper l’hallucination collective. Ca ne risque plus d’arriver ,sous la pression de la meute elle a retourné sa veste, on la comprend.
Aujourd’hui la confusion est soigneusement entretenue avec la période de antérieure pédophile de G.M. pour nous faire avaler que V.S. avait 10 ans d’âge mental comme les petits philippins et ca marche sur l’opinion publique qui démarre au quart de tour. On a même pas besoin de la manipuler l’opinion publique ,elle se met en vrille toute seule au point que V.S. en appelle au calme dans la presse pour tenter de stopper la « chasse à l’homme ». Elle a écrit son récit pour être à égalité et répondre à Matzneff sans souhaiter qu’on interdise les livres de ce dernier. Alors qu’on la jugeait assez grande à l’époque des faits on pense aujourd’hui à sa place en interdisant les livres du vilain monsieur comme si on la prenait pour une gamine malade qu’il fallait protéger malgré elle et qu’on lui déniait son statut d’auteur.
Avec son sourire intérieur énigmatique affiché en couverture qui ne s’attendait pas à un tel retentissement V.S. signe un pacte avec le diable avec son premier roman « thérapeutique » au prix de la gloire posthume apportée à son affreux jojo jusqu’alors confiné à un public restreint. Même ma concierge le connait maintenant!
A n’en pas douter lorsqu’il ressortira du placard, on lira plus le colossal journal de G.M. que P.S. dans 50 ans. Sade est toujours dans les vitrines des librairies, en comparaison toute proportion gardée G.M. dans une autre catégorie aux dimensions de notre époque risque bien de connaître le même sort. Une sorte de « Casanova des lycéennes » du 20 éme siècle.
Il faudrait que je pense à mettre ma bibliothéque sous verre blindé, elle prend de la valeur tous les jours. Si les nymphettes se coalisent, bientôt avec les livres de Roland Jaccard elle doublera de valeur.
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