FLAVIE FLAMENT, SI PROCHE DE VALÉRIE SOLANAS….

J’aimais bien David Hamilton de quelques années mon aîné, que je croisais parfois boulevard Montparnasse. Ses photos avaient bercé mon adolescence. Et personne n’y voyait rien d’obscène. Les plus grands artistes avaient travaillé avec lui et même Alain Robbe-Grillet avait signé un livre :  » Rêves de jeunes filles  » avec Hamilton dont la notoriété s’étendait au monde entier. Il y régnait un érotisme doux, presque chaste, qui n’offusquait personne. Ses films, en revanche, passaient inaperçus : le photographe avait éclipsé le cinéaste dont on retiendra néanmoins :  » Laura ou les ombres de l’été  » avec Dawn Dunlap actrice à laquelle Olivier Mathieu a rendu un bel hommage dans  » Le Portrait de Dawnn Dunlap « .

Je savais par un ami commun que la situation de David Hamilton était devenue précaire et que certaines rétrospectives de son œuvre avaient été annulées suite à des accusations de pédophilie : sans doute portait-il aux très jeunes filles un amour immodéré. Mais jamais la justice, en dépit de deux plaintes, ne l’avait jugé coupable. Et voici que trente années plus tard, une ex présentatrice de télévision, Flavie Flament, un de ses anciens modèles le prend pour cible dans un médiocre roman intitulé :  » La Consolation « . Le nom de Hamilton sent alors le souffre, tout comme ceux de Weinstein, de Woody Allen, de Polanski , de Balthus et de tant d’autres.

Sans doute lassé par une époque où la délation et la vulgarité commandent l’esprit du temps, David Hamilton se donne la mort dans des circonstances encore mal élucidées. On le trouve étouffé dans la nuit du 25 novembre 2016  » avec un sac plastique sur la tête  » et la porte ouverte de son appartement. Certains pensent qu’il aurait pu être assassiné. Je crois surtout qu’il était dégoûté par un monde où il n’avait plus sa place et qu’il en a tiré la conclusion logique.

Mais j’apprends non sans stupéfaction que Flavie Flament dans une vidéo diffusée récemment par YouTube et que chacun peut consulter se réjouit, trente ans après , de la stratégie qu’elle a mise en œuvre pour devenir  » le bourreau de son bourreau « , stratégie qui lui a permis de se  » reconstruire « . Elle parle d’Hamilton comme d ‘ un monstre de lâcheté, mort de manière vulgaire et sans panache, le visage couvert d’un sac en plastique, car il ne supportait pas de voir son image. On a rarement été plus loin dans l’ignominie. Et, au passage, tous ceux qui ont eu recours au sac plastique pour se suicider apprécieront….s’ils en ont encore l’occasion.

Cette sordide histoire m’a rappelé celle de Valérie Solanas, intellectuelle féministe radicale, qui appelait dans son  » Scum Manifeste  » à châtrer les hommes et qui tenta d’abattre Andy Warhol et deux de ses compagnons. Elle passera trois ans en prison, soutenue par les féministes américaines ( le National Organization for Women ) qui voyait en elle la championne la plus remarquables des droits des femmes. Lou Reed, lui, déclara :  » Je crois bien que j’ aurais appuyé sur l’interrupteur de la chaise électrique moi-même.  »

 

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Sans recourir à de telles extrémités, on s’interrogera légitimement  – Houellebecq l’avait fait à l’époque – sur la haine des sexes et la férocité du désir de vengeance de femmes sans doute humiliées et blessées à un âge où elles idéalisaient encore les rapports amoureux. Mais quoi qu’ait subi Flavie Flament de la part de David Hamilton, ce qui est loin d’être prouvé, sa jouissance à l’annonce de son suicide et la stratégie à long terme mise pour y parvenir, me laisse pour le moins songeur. Je me garderai bien de me scandaliser, ne sachant ce qui relève d’une obsession pathologique ou d’ un désir immodéré de rester sous les feux de la rampe en un temps où ce genre de dénonciation  vous valorise plus qu’i n’inspire  le dégoût. Mais il me prend parfois l’envie , à moi aussi , d’appuyer sur l’interrupteur de la chaise électrique, tant je trouve basses les délations qui se succèdent et dont on devine les conséquences. Faut-il vraiment, comme le suggère Madame Taubira, que les hommes apprennent ce qu’est l’humiliation ? Auquel cas je ne saurai leur conseiller meilleure maîtresse que Flavie Flament.

4 réflexions sur “FLAVIE FLAMENT, SI PROCHE DE VALÉRIE SOLANAS….

  1. J’avais tellement, tellement aimé la tentation nihiliste, que j’ai lu fiévreusement à quinze ou seize ans. Mais quelle déception monsieur Jaccard, quelle déception de vous lire aujourd’hui et de voir que vous êtes resté fixé à une négation. En témoigne votre article sur F.Flament. Et ce que vous dîtes sur les écrivains. Et dans votre bio, la présence des lettres FN concernant la politique. Quelle misère. Et je comprends très bien le chemin pour arriver là. Il suffit de ne plus être en mouvement. De rester immobile. Et le temps fait le reste. La coagulation fait le reste. Je suis désolé pour vous que vous n’ayez pas vécu de déchirement tel qu’il vous permet de voir plus loin que cette tentation, qui n’en est plus une d’ailleurs, mais une complaisance. Je crois me souvenir que vous parliez à la fin du bouquin d’ailleurs de la gratitude de Cioran pour les pierres, pour être ce qu’elles sont. Cioran a réussi à passer au-delà et à entrapercevoir ou même habiter dans autre chose que la négation. Vous non, apparemment.
    Je vous remercie vraiment d’avoir allumé un incendie dans mon coeur de seize ans. Il m’a poussé à chercher, à m’atteler à l’art, à chercher, jusqu’à naître une seconde fois, puis une troisième, et ainsi de suite. J’aurais tout donné pour vous rencontrer à cette époque. Aujourd’hui, à vous lire, je n’aurais rien à vous dire. C’est bien dommage. Et Hamilton qui se suicide, dans la mesure où cet homme a abusé de mineures pendant des années, (j’aurais tendance à croire cela plutôt que l’inverse, vu les récits qui ont été partagés), je n’y vois au final qu’une lâcheté sans nom. Je ne vois pas de victime. Et si on n’est pas victime, dans ce cas là, on fait face. Le suicide est une reconnaissance tacite non pas de l’horreur du monde, mais de l’horreur de ce que cet homme a fait, impossible à assumer en dehors d’un assouvissement facile de pulsions.

    Bien à vous.
    Yan Allegret

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  2. Yan, vos propos ne font que renforcer et confirmer encore un peu plus Roland Jaccard dans ses convictions entre autres comme quoi il est vain et présomptueux d’espérer être compris par son lecteur et encore moins le faire changer d’avis. Tout n’est que malentendu, vous en êtes une parfaite illustration. Cioran et Jaccard son fils spirituel partagent un ressenti qui vous échappe sinon vous ne diriez pas que le suicide (de qui que ce soit dans quelques situations que ce soit) relève d’une lâcheté. Pour ces deux la, c’est rester en vie qui est une lâcheté, en mettre un au dessus de l’autre est une incohérence de plus. Vous n’êtes pas de leur galaxie, vous ne pouvez la saisir.

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