Rommel face à Hitler

Hitler méprisait les généraux de la Wehrmacht, à l’exception du Maréchal Erwin Rommel. Mais leurs desseins divergeaient. Hitler voulait plus que la conquête de l’Europe et l’extermination des juifs, il voulait l’anéantissement de l’Allemagne. Il confiait à Goebbels qu’il n’appréciait pas vraiment ces grands blonds un peu trop mous. Des Japonais, ajoutait-il, auraient été à la hauteur de ses ambitions.

Rommel, lui, était un soldat qui se consacrait exclusivement à l’art de la guerre – Une guerre sans haine, tel était d’ailleurs le titre de son livre. Toute guerre qui ne se nourrissait pas d’une réflexion intellectuelle, ne pouvait, selon lui, aboutir qu’à une longue série d’horreurs absurdes. « La guerre, disait-il volontiers, est un phénomène social bien plus complexe que le jeu d’échecs. Les combinaisons y sont infiniment plus nombreuses et certaines d’entre elles échappent à toute analyse logique. »

Le mot d’ordre d’Hitler, « Vaincre ou mourir » le consternait. Trop puéril, pensait-il. Le jour viendrait où Rommel se retournerait contre le Führer. Mais Hitler le redoutait. Il était trop populaire, même auprès de ses ennemis, pour se débarrasser de lui aussi facilement que des conjurés du 20 juillet 1944. Il eut droit à des funérailles nationales. La vérité, une mort volontaire par dégoût, n’émergea qu’après la capitulation de l’Allemagne.

Deux immenses acteurs ont incarné Rommel à l’écran: Erich von Stroheim dans Les cinq secrets du désert de Billy Wilder (1943) et James Mason dans Le Renard du désert d’Henry Hathaway (1951). Autant Stroheim colle à l’image d’un officier allemand (c’est quasiment génétique chez lui en dépit de ses origines juives et viennoises), autant James Mason peine à endosser l’uniforme d’un général nazi. Il faut attendre la fin de l’enquête poussive d’Henry Hathaway sur le suicide de Rommel pour qu’il devienne crédible. James Mason, cet ancien étudiant en architecture de Cambridge, était plus à l’aise en intellectuel suisse légèrement pervers dans Lolita que comme interlocuteur du Führer. Mais c’est précisément sa droiture, son absence de cynisme dans le rôle de Rommel, ainsi que ses doutes et ses maladresses qui le métamorphosent en ce qui lui répugnait le plus : un traître. Certes à sa manière. Sans l’assumer pleinement. Sans avoir conscience que le véritable héroïsme résidait moins dans ses combats à la tête de l’Afrikakorps que dans le reniement de tout ce en quoi il avait cru. Churchill lui rendra un vibrant hommage. Ce sont les dernières images du film d’Hathaway.

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